Immobilier
La localisation, critère clé pour réussir un investissement locatif, conditionne le rendement et l'afflux des candidats locataires.
Par Mathilde Ridole, Laurens Dekock et Raphael Cockx 23 février 2024
L'investisseur doit considérer de nombreux critères avant de placer ses billes sur le marché immobilier: l'état du bien, la performance énergétique, la fiscalité, mais aussi la localisation, qui déterminera une série d'autres paramètres comme le prix d'achat, le montant des loyers, le rendement et le potentiel locatif du bien.
Par exemple, un propriétaire qui investit en ville est certain de trouver rapidement des locataires. Seul bémol: les prix y sont souvent nettement plus élevés qu'à la campagne, ce qui impacte le rendement. À l'inverse, à la campagne, les prix sont inférieurs à ceux du marché et offrent un meilleur rendement. Néanmoins, le risque de vide locatif est plus élevé, car les candidats-locataires sont généralement moins nombreux. Où, dès lors, placer le curseur?
Sur base des loyers et des prix d'achat au mètre carré communiqués par la plateforme de données spécialisées Realo, nous avons analysé les marchés immobiliers wallon et bruxellois. Décryptage.
Dans ce graphique, nous avons placé le prix d'achat par commune sur l'axe horizontal et le loyer par commune sur l'axe vertical.
En termes de prix, c'est la commune hennuyère d'Estampuis qui est la moins chère. Un appartement y coûte 988,97 euros/m2. La commune de La Hulpe est la plus chère avec 4.206,35 euros/m2. Du côté des loyers, c'est Trois-Ponts qui est la commune la plus abordable, au prix de 5 euros/m2 par mois. Ixelles est la commune où louer coûte le plus cher, à 15,40 euros/m2 par mois.
Sur base de ces 230 communes, nous avons pu calculer la médiane des deux paramètres (prix et loyers). Dans la moitié des communes, le loyer dépasse 8,82 euros/m2 par mois, tandis que le prix d'achat médian est légèrement supérieur à 2.083 euros/m2.
En bas à gauche, se trouvent les communes où les prix d'achat et les loyers sont les moins chers. À l'autre extrémité du tableau, en haut à droite, se trouvent les communes où les prix d'achat et les loyers sont supérieurs à la médiane.
La ligne médiane qui traverse toutes les communes montre qu'il est généralement possible d'obtenir un loyer plus élevé lorsque le bien est situé dans une commune plus chère. À l'inverse, dans les communes où les prix d'achat sont bas, les loyers sont plus faibles.
Toutefois, il existe de nombreuses exceptions à cette règle. Et les investisseurs peuvent en tirer parti. Les communes qui se situent au-dessus de la ligne de tendance ont des loyers plus élevés que ceux auxquels on pourrait s'attendre sur la base du prix d'achat.
La commune de Koekelberg fait exception. Le prix d'achat moyen y est certes supérieur de plus d'un quart à la médiane, mais le loyer moyen est jusqu'à 350 euros plus élevé que dans les communes se situant dans le même segment de prix. Le rendement brut y est donc beaucoup plus élevé qu'à Neufchâteau, par exemple.
Le même raisonnement s'applique également en sens inverse: dans des communes où les loyers sont identiques, mais où le prix d'achat est inférieur pour l'une d'entre elles, le rendement est plus élevé. Koekelberg est ainsi plus intéressante que Louvain-La-Neuve. Le loyer est sensiblement le même, mais un appartement de 100 m2 coûte généralement 135.000 euros de moins à Koekelberg. Un prix d'achat élevé ne se traduit donc pas partout par un loyer plus élevé.
Les communes bruxelloises s'en sortent également bien. À Koekelberg, Ganshoren, Saint-Josse-ten-Noode et Molenbeek-Saint-Jean, les loyers sont plus élevés tandis que les prix y sont relativement plus accessibles qu'ailleurs dans la capitale. Les rendements y sont donc plus élevés.
Ixelles, Uccle et Watermael-Boitsfort sont moins intéressantes en raison des prix d'achat supérieurs. Cependant, elles obtiennent des rendements plus élevés que la plupart des communes wallonnes. Parmi les grandes villes wallonnes, c'est Charleroi qui obtient le meilleur rendement.
En raison des montants de ses loyers qui sont plus élevés, c'est Clavier, commune localisée en province de Liège, qui obtient le rendement le plus élevé. Le loyer d'un appartement de 100 m2 est 500 euros plus cher que la médiane, alors que le prix d'achat est nettement moins élevé.
En observant le graphique, on constate que les communes qui offrent les rendements les plus intéressants se situent principalement dans le Hainaut. À Quiévrain, le rendement brut dépasse 9%. Les communes hennuyères de Dour, Colfontaine et Aiseau-Presles affichent des rendements autour de 8%. Ils sont légèrement inférieurs dans les villes principales: 6,9% à Charleroi, 5,49% à Tournai et 5,88% à Mons.
De l'autre côté, dans certaines communes où les prix à l'achat sont très élevés, mais pas les loyers, le rendement brut dépasse à peine le taux d'inflation de référence de 2%. C'est le cas à Trois-Pont (Liège), où il s'établit à 1,68% ou encore à Saint-Léger (Luxembourg) avec 2,6%.
En investissement, que ce soit sur le marché des actions ou sur le marché immobilier, le rendement et le risque sont étroitement liés. On parle souvent de "couple rendement-risque". Plus le rendement est élevé, plus le risque est élevé, et inversement.
Investir à Quiévrain ou dans une commune du Hainaut pour obtenir 8% de rendement s'avère plus risqué qu'à Ixelles ou Uccle, où le rendement est de l'ordre de 4%. Le risque de vide locatif est en effet supérieur dans les communes plus excentrées que dans les villes, où les candidats-locataires sont généralement plus nombreux.
Nous avons donc étudié la proportion de propriétaires et de non-propriétaires dans les différentes communes wallonnes et bruxelloises. Le but était de déterminer où les plus grandes parts de locataires se localisent.
La Région bruxelloise compte de loin le plus grand taux de locataires (61%). Dans certaines communes, comme à Bruxelles-Ville, Saint-Gilles, Ixelles, Etterbeek et Saint-Josse-ten-Noode, ce taux dépasse même la barre des 70%.
Les locataires sont également plus nombreux dans les chefs-lieux des provinces wallonnes que dans le reste de la Région. Ainsi, 58,8% des ménages sont locataires à Liège, 50% à Namur, 45% à Charleroi, 46,5% à Arlon et «seulement» 38,6% à Wavre. D'autres communes affichent également une proportion de propriétaires relativement basse, offrant un réel potentiel locatif pour les investisseurs. C'est le cas de Mons, où plus de 47% des ménages sont locataires, mais aussi de Tournai (42%), Ottignies-Louvain-la-Neuve (54%), Nivelles (46%) ou encore Florennes (57%), Dinant (47%) et Ciney (44%).
Dans certaines communes, le nombre de propriétaires est très élevé. Cela laisse peu de possibilités aux investisseurs d'y trouver des locataires et augmente le risque de vide locatif. À La Bruyère, entre autres, seuls 18% des ménages sont locataires. Il en va de même pour Musson (17%), Saint-Léger (21%), Nandrin (18,3%) ou encore Héron (17%) et Musson (17,91).
En tenant compte de ces quatre paramètres pour chaque commune (prix, loyer, rendement et part de ménages locataires), nous avons obtenu un indice permettant de classer les communes de manière objective. Plus l'indice est élevé, plus l'investissement est intéressant (les valeurs de cet indice vont de 0 à 1). En Région bruxelloise, c'est Koekelberg (0,82) qui renseigne le meilleur indice, à égalité avec Saint-Josse-ten-Noode, suivie de Ganshoren (0,81). C'est dans le nord de la Région bruxelloise que le potentiel est le plus intéressant pour les investisseurs.
Les communes les plus chères (Woluwe-Saint-Pierre, Uccle, Ixelles) se trouvent dans le bas du classement, mais affichent un meilleur score que bon nombre de communes wallonnes et se situent dans le milieu du classement général (Wallonie et Région bruxelloise confondues).
En Wallonie, le haut du classement est dominé par une série de communes hennuyères (Charleroi, Quiévrain, Châtelet, Farciennes, Fontaine-l'Évêque, Mons) et quelques localités liégeoises. À l'inverse, une série de communes représente peu d'intérêt pour les investisseurs: Mont-de-l'Enclus, Neupré, Saint-Léger, Braives, Héron, Attert ou encore Marchin.
En conclusion, le propriétaire en quête d'un rendement intéressant et d'un investissement sécurisé a intérêt à privilégier la Région bruxelloise ou certaines communes du Hainaut. Il doit aussi veiller à éviter les petites localités où la plupart des ménages sont propriétaires.